12 étapes marquantes de notre tour du monde…

Le départ

Le lundi 27 septembre 2010 à 14 heures et 23 minutes, PlanetSolar franchit la ligne de départ de son tour du monde, le premier destiné à être réalisé à l’énergie solaire. Il quitte le port de la Principauté de Monaco, soutien inconditionnel durant tout le projet. Quelques heures auparavant, le Prince Albert II de Monaco était d’ailleurs monté à bord pour souhaiter « bon vent », ou plutôt beaucoup de soleil, à l’équipage. Les cornes de brume retentissent dans tout le port, saluant le départ du vaisseau solaire. La côte s’éloigne désormais tandis que la proue fend les eaux de la Méditerranée et fait cap à l’Ouest.

1 La traversée de l'Atlantique

Après le détroit de Gibraltar, l’horizon immense de l’Atlantique s’ouvre devant PlanetSolar. De Las Palmas à Miami, ce ne sont pas loin de 20 000 kilomètres qui se profilent devant le bateau solaire. Il sera le second à traverser l’océan Atlantique à l’énergie du soleil, puisque l’exploit a été réalisé entre 2006 et 2007 par le Sun21, autre projet de pionniers suisses. La traversée dure un gros mois. L’option choisie est celle de naviguer sur une route plutôt centrale, aux environs de 240° de latitude nord. Il s’agit en effet de profiter de l’ensoleillement maximum ainsi que des alizés bien installés à cette saison automnale. PlanetSolar fait son entrée dans le port de Miami le 27 novembre 2010, bouclant sa première traversée océanique avec succès.

2 Cancun

Le 7 décembre 2010 au matin, PlanetSolar et son équipage entrent dans Cancun (Mexique). Or, en cette ville se tient alors la conférence de l’ONU sur les changements climatiques et le but est de venir amarrer le catamaran solaire devant le palace dans lequel se déroulent les discussions et les prises de décision. Mais l’idée doit être abandonnée car à cet endroit précis la profondeur du lagon est insuffisante. PlanetSolar risque de s’échouer, mettant l’ensemble de son projet de tour du monde en péril. Les dirigeants présents ne pourront donc pas monter à bord et PlanetSolar fait demi-tour, direction Carthagène (Colombie).

3 Canal de Panama

Le 13 janvier 2011, PlanetSolar s’apprête à quitter les eaux atlantiques pour rejoindre un nouvel horizon, celui du Pacifique. L’immense catamaran solaire va emprunter le canal de Panama. Pour l’occasion, Immo Ströher, qui a financé la construction du bateau, a fait le déplacement. Il s’était en effet juré d’être à bord au moment où celui-ci franchirait le célèbre canal. Le passage des écluses se fait normalement exclusivement avec l’aide de locomotives halant les embarcations. Or, l’entier du tour du monde doit être solaire pour PlanetSolar. Le catamaran sera donc autorisé à franchir les 77 kilomètres de canal par ses propres moyens, grâce à sa propulsion solaire. A bord, l’émotion est grande : les portes du Pacifique sont désormais grandes ouvertes.

4 Sauvetage de la tortue

Sur sa route pour les Iles Galapagos, première étape de sa transpacifique, PlanetSolar doit faire face à l’une des douloureuses expériences de son tour du monde. Il doit en effet traverser un véritable continent de déchets plastiques flottant au gré des courants, témoignage d’une humanité terrestre peu soucieuse de son impact sur les océans… Un jour, depuis son cockpit, le capitaine Patrick Marchesseau aperçoit une tortue géante prise dans le cordage d’une bouée, noyée dans cet océan de plastiques. Incapable de se libérer, elle est contrainte à se laisser dériver. Jens et Raphaël décident alors de plonger pour lui porter secours. Un ou deux coups de couteau plus tard, la voilà à nouveau libre. Le noble animal plonge alors et disparaît dans les eaux des profondeurs. Or, en dépit de combinaison de plongée protectrice, les deux sauveteurs ressortent de l’eau saumâtre couverts de sangsues poisseuses. L’équipage constate ainsi ce jour-là combien l’océan est une poubelle pour l’homme… combien aussi il est urgent de changer.

5 Galápagos

Après dix jours de mer depuis Panama, PlanetSolar rencontre le merveilleux archipel des Galapagos, connu pour sa faune hors du commun et ses îles paradisiaques. A San Cristobal, l’accueil réservé au bateau et à son équipage est grandiose. Plus tard, ils apprendront que depuis le passage de PlanetSolar et du message délivré au sujet de la durabilité, les autorités locales ont adapté leur législation. Certaines îles de l’archipel ne sont désormais accessibles qu’avec des embarcations propres, à voile ou électriques. Cette disposition a été un grand soutien au développement des bateaux solaires dans cette région du monde, désormais très nombreux dans cet archipel mythique !

6 Le Pacifique

Voilà PlanetSolar lancé dans le sillage du célèbre Kon-Tiki. 6000 kilomètres de mer s’étendent devant la proue du catamaran solaire jusqu’à la prochaine étape, la Polynésie française. Durant 27 jours, l’équipage ne perçoit aucune présence humaine : pas un bateau, ni le plus petit avion dans le ciel, ne se fait voir. La nuit, les étoiles brillent comme jamais et les membres d’équipage peuvent contempler la voie la voie lactée, couchés sur les immenses panneaux solaires de leur vaisseau.

7 Escale aux Marquises et tsunami

Le 4 mars 2011, PlanetSolar accoste dans le port de Nuku Hiva. Dans tout l’archipel des Marquises, sur les traces de Paul Gauguin et de Jacques Brel dont le souvenir est encore bien présent en ces îles, l’équipage reçoit un accueil chaleureux et enthousiaste. La beauté des lieux et la générosité de Marquisiens laisseront dans la mémoire des marins solaires une emprunte immuable. Cependant, isolés dans cette enclave de paradis, ils sont cependant brutalement rappelés à la réalité du monde dans la nuit du 11 mars. Alors que PlanetSolar mouille en haute mer, Raphaël apprend, via le satellite et l’Inmarsat C, qu’un tremblement de terre a ébranlé le Japon. L’alerte au tsunami est donnée sur l’ensemble du Pacifique, et donc sur les Marquises… PlanetSolar est fort heureusement à l’abri. L’inquiétude est cependant grande pour tout l’équipage qui apprend les dégâts engendrés à Fukushima et les conséquences de cet accident nucléaire, montrant à nouveau les limites de cette source d’énergie et la nécessité de changer.

8 Tempête à Brisbane

Après les Marquises et des étapes à Papeete, à Bora-Bora et aux Tonga, PlanetSolar se dirige vers l’Australie. Météo-France annonce une mer plutôt agitée et très rapidement, le bateau se retrouve ballotté par un vent dépassant allégrement les 25 nœuds. Le vaisseau solaire évolue péniblement dans des creux de plus de quatre mètres, sur un océan démonté. Les périodes de repos sont écourtées pour l’équipage, celles de quart, rallongées… Le pire est cependant à venir. A quelques 150 milles de Brisbane, le vent forcit brutalement et le bullettin météo confirme que la tempête va durer trois longues journées. PlanetSolar relève le défi, fait le gros dos et tient la tempête. Dans la nuit du 26 avril 2011, les airs se sont calmés. Le vaisseau solaire est accompagné d’une baleine à son entrée dans l’estuaire et les portes de l’Australie s’ouvrent enfin devant l’étrave.

9 Îles Andaman

Après des escales à Manille, à Hong Kong et à Singapour, PlanetSolar fait son entrée dans l’océan Indien, là où aucun bateau solaire n’a jamais navigué avant lui… Longer la Malaisie n’est pas sans danger. Des bateaux pirates naviguent dans les environs et PlanetSolar choisit de traverser la zone la plus sensible tous feux éteints, de nuit. A l’approche de Phuket, le lever de soleil sur l’archipel thaïlandais de Ko Phi Phi restera gravé dans la mémoire de l’équipage… Avant de rejoindre le Sri Lanka, via la mer d’Andaman et le golfe du Bengale, le bateau est soumis à de très forts courants, de véritables fleuves en pleine mer ! L’équipage fait le choix de s’arrêter quelque peu aux abords des îles indiennes d’Andaman, afin de recharger les batteries à bloc. Or, ces îles sont très mal répertoriées sur les cartes marines, et donc fermées à la navigation. Très vite cependant, les autorités indiennes comprennent qu’il s’agit là d’un cas sans précédent. Une fois montés à bord, les militaires indiens s’enthousiasment du récit des marins solaires et proposent leur aide si nécessaire. En attendant que les batteries se rechargent, une partie de l’équipage s’en ira découvrir l’île vierge sur laquelle ils ont accosté et, tel Robinson, découvriront un milieu naturel totalement préservé.

10 Avarie à Abu Dhabi

PlanetSolar a longé la côte ouest de l’Inde. La haute mer est désormais derrière pour lui. Il fait escale à Doha et à la mi-janvier 2012, il reprend la route pour Abu Dhabi… Mais la chance qu’a eue l’équipage s’estompe en ce vendredi…13 ! A peine sorti du chenal, le bateau se retrouve pris dans une brume épaisse et doit naviguer non pas à vue, mais au radar. Il accoste cependant sans problème deux jours plus tard à côté du World Future Energy Summet, rencontre internationale entre scientifiques, politiciens, hommes d’affaires et investisseurs au sujet des problèmes énergétiques et de leurs solutions potentielles.

Quelques jours plus tard, PlanetSolar s’apprête à rejoindre Dubaï. Mais soudain, et peu après avoir quitté le chenal, un bruit sourd retentit dans le cockpit. L’équipage stoppe les moteurs et va inspecter les systèmes de propulsion. A tribord, le problème est important… et PlanetSolar, devenu incontrôlable, est poussé par des vents violents vers la jetée du port… Le danger est grand de perdre le bateau et les hommes d’équipage. A l’aide d’un gros zodiac de la marina, l’équipage tente d’emmener le bateau jusqu’au canal où il pourrait se mettre à l’abri mais le cordage se prend dans l’hélice et la solution restante est de jeter l’ancre… Désormais, dans cette mer démontée, il faut espérer qu’elle tienne les assauts du vent et des vagues. La nuit est tombée et un remorquage dans ces conditions serait une folie. L’ancre doit tenir jusqu’à l’arrivée du jour. Raphaël et Jens décident d’aller voir de plus près le problème et plongent. Ils constatent bien vite que c’est le système de blocage du pas variable qui s’est dévissé… Deux petites vis et c’est toute l’aventure PlanetSolar qui menace de s’arrêter ! Au petit matin, après une nuit d’angoisse, les appels à l’aide sur la côte restent vain, personnes ne voulant se risquer dans ces conditions. Dégager l’hélice tribord, puis celle bâbord va nécessiter à l’équipage un travail périlleux de plus de quatre heures. En milieu d’après-midi, l’ancre est hissée hors de l’eau et PlanetSolar, ayant échappé au pire, appareille tout seul vers l’Emirates Palace Marina.

11 Haute sécurité dans le Golfe d’Aden

La prochaine étape du voyage de PlanetSolar porte le nom de « opération golfe d’Aden ». Le passage de cette mer est en effet extrêmement dangereux, car infestée de pirates. Christophe Keckeis, ancien chef de l’Armée suisse, est chargé d’organiser la sécurité à bord. PlanetSolar est alors transformé en véritable « bunker » : six hommes, tous d’anciens soldats des commandos d’élite de l’armée française, montent à bord et l’équipage de PlanetSolar se préparent à une attaque grâce à des exercices de simulation. Le vaisseau solaire quitte discrètement le port d’Abu Dhabi et s’engage dans la mer d’Oman pour rejoindre le dangereux golfe d’Aden. Erwann a laissé le commandement à Patrick Marchesseau qui connaît parfaitement la région. De nuit, PlanetSolar navigue tous feux éteints. Durant sa traversée, l’équipage sera mis sous pression une seule fois, des pirates ayant repéré et suivi l’étrange bateau solaire quelque temps… Ils renonceront pourtant, pour le plus grand soulagement de l’ensemble des hommes à bord, à approcher PlanetSolar. Au début du mois de mars 2012, PlanetSolar accoste sans encombre pour une brève escale à Djibouti. Il traverse quelques jours plus tard le détroit de Bab-el-Mandeb, ultime « point chaud » de la région, et pénètre enfin en Mer Rouge.

12 Plongée sur Précontinent II

A mi-chemin sur la Mer Rouge avant le canal de Suez, l’équipage fait escale à Port Soudan. Cap est ensuite mis sur le récif de Shab Roumi, où il s’agit de recharger les batteries mais aussi, surtout, de s’en aller plonger sur le village sous-marin du célèbre Commandant Cousteau, Précontinent II. Gérard d’Aboville, grand navigateur français et parrain de l’aventure PlanetSolar, a rejoint l’équipage pour cette expédition subaquatique sur les trace de leur héros à tous. La découverte de ce site historique est un moment merveilleux pour les marins solaires. Cousteau souhaitait prouver que l’homme peut vivre sous la mer et c’est ici qu’en juin 1963, cinq hommes ont vécu un mois sous l’eau, devenant les premières « océanautes » de l’histoire. Albert Falco, compagnon de Cousteau, capitaine de la Calypso et qui participa à cette aventure fabuleuse sous la mer, devait être présent lors de cette plongée. Ami de Raphaël et parrain lui aussi de l’aventure PlanetSolar, il est malheureusement très malade. Il quittera ce monde quelques semaines plus tard, peu avant la fin du tour du monde, laissant à l’ensemble de l’équipage une émotion profonde et le sentiment de voir une page d’histoire se tourner…

13 Record de production d’énergie

Franchir le canal de Suez n’est pas une mince affaire mais, le 29 mars 2012, PlanetSolar navigue à nouveau sur la mer qui a vu débuter sa circumnavigation, la Méditerranée. La fin de l’aventure est proche… Le bateau solaire fait encore escale à Zakynthos, en Grèce, puis à Messine, en Sicile. Lors de la remontée de la côte italienne, les escales s’enchainent car elles permettent de faire monter à bord des journalistes, venus du monde entier pour suivre les derniers jours du périple. PlanetSolar se rapproche chaque jour de son ultime destination, Monaco. Calvi sera la dernière étape avant l’arrivée. Il ne reste que 170 kilomètre à parcourir et, dans les esprits de chacun sur le bateau, on se dit que rien n’est acquis et que tout peut encore arriver. Il est difficile de réaliser que l’exploit est sur le point de devenir réalité. Mais avant son arrivée, et comme pour montrer une dernière fois ses ressources et ses capacités étonnantes, PlanetSolar bat son propre record de production d’énergie le 3 mai. 661 kilowatts-heures, c’est mieux que ce qu’il a pu produire dans les endroits les plus ensoleillés de la planète !C’est aussi, et surtout, la preuve tangible qu’après presque deux ans de navigation intense sur l’ensemble du globe, le matériel utilisé est toujours intact ; la technologie solaire est mure et d’une fiabilité à toute épreuve.

Arrivée

Leur dernière nuit en mer, PlanetSolar et l’équipage vont la passer en pleine mer, à 50 kilomètres du port de la Principauté de Monaco qui constitue l’ultime étape de ce tour du monde. A Monaco, le comité d’accueil est au complet : tous ceux qui ont rendu possible cette formidable aventure sont à quai, attendant l’arrivée de PlanetSolar. C’est ainsi que le 4 mai 2012 peu après 15 heures, PlanetSolar franchit sa ligne symbolique d’arrivée, après 585 jours de navigation et plus de 60’000 kilomètres parcourus. Il entre à ce moment précis dans l’histoire pour être le premier véhicule à avoir bouclé une tour du globe grâce à la seule énergie du soleil. Les images qui nous montrent Raphaël Domjan, Patrick Marchesseau, Erwann Le Rouzic, Jens Langwasser et Christian Ochsenbein enlacés sur le pont de leur fidèle bateau ont depuis fait leur propre tour du monde…